Nous opposons souvent le monde des adultes et le monde des enfants.
Dans le premier, on est sérieux, responsable, on bosse dur, on affronte des situations difficiles etc… et dans le second, on est dans la légèreté, l’innocence, la joie, le plaisir, la créativité… Si nous avons conscience que nous avons besoin de ces deux mondes, nous avons tendance à les imaginer incarnés par des personnes différentes. Or, nous avons aussi ces 2 facettes en chacun de nous. Et savoir exprimer à la fois notre part d’adulte et notre part d’enfant est un levier de croissance personnelle très fort.
Hélas, on a plutôt tendance à nous apprendre à laisser notre part d’enfant derrière nous lorsque nous grandissons. Certains parviennent à la garder. On les qualifie en général d’artistes, d’originaux, de personnes décomplexées… D’autres réussissent à exprimer leur part d’enfant de temps en temps, notamment dans des environnements où ils se sentent à l’aise, où ils disent pouvoir être eux-mêmes, ou après quelques verres qui désinhibent. Enfin, pour une grande majorité, cette part semble oubliée ou inaccessible, quand bien même, ils entendent régulièrement des injonctions du type « lâches toi un peu » !
En fait, pour ces derniers, comme pour les seconds d’ailleurs, une partie d’enfant s’exprime régulièrement, mais ce n’est pas ce qu’on appelle l’enfant libre. Explications à travers les différents Etats du Moi de l’analyse transactionnelle :
L’enfant adapté, qu’il soit dans l’obéissance (enfant soumis) ou dans l’opposition (enfant rebelle), c’est la part de nous qui s’exprime face aux différentes figures d’autorité (l’Etat, nos parents, notre patron etc…). Au contraire, l’enfant libre, lui, est totalement détaché de ce que les autres peuvent penser ou dire. Il pense, dit et fait les choses comme il le sent. Alors, oui, il y a un peu d’égoïsme ou de « je m’en foutisme » dans un enfant libre. C’est sans doute l’une des raisons qui fait que nous l’avons enfoui. Mais comme je le dis souvent, le but est de chercher le bon équilibre et de ne pas tomber dans un excès (oublier son enfant libre), ni dans l’autre (n’être qu’en mode enfant libre). Pour en savoir + , découvrez l’article « tu n’es pas seul dans ta tête et c’est une bonne chose ».
Si vous regardez autour de vous, je suis sûre que vous connaissez au moins une personne que vous qualifieriez comme quelqu’un de très solaire, énergique, spontané, libre. Sans doute que vous trouvez dès fois cette personne trop légère, un peu naïve, un peu sans gêne. Mais je suis sûre aussi que vous appréciez, voire enviez, un peu cette insouciance, ce bonheur qui se dégage d’elle. Et sans doute que cette personne connait aussi des responsabilités, des difficultés…comme tout le monde… C’est « juste » qu’elle sait ne pas être toujours en mode adulte ou parent, et qu’elle s’autorise à exprimer son enfant libre.
Regardons d’un peu plus près ce qui fait les spécificités d’un enfant libre. Cela pourra sans doute vous donner des pistes pour réveiller celui qui sommeille en vous :
L’enfant libre est curieux
« et pourquoi ? et pourquoi ? et pourquoi ???? »
Nous avons tous été un jour en face d’un enfant qui ne cessait de nous demander pourquoi et encore pourquoi, jusqu’à ce que, agacés, nous répondions, « parce que c’est comme ça » ! et bien voilà d’un côté un enfant libre caractérisé par une soif d’apprendre, de comprendre. Et de l’autre côté, notre part d’adulte/parent qui pense devoir apporter une réponse à tout et qui clôt donc la conversation lorsqu’il ne sait plus répondre ou qu’il estime avoir mieux à faire…
« Pourquoi les enfants posent-ils des questions ouvertes ?
parce qu’ils veulent tout savoir.
Pourquoi les adultes posent-ils des questions fermées ?
parce qu’ils croient tout savoir »
(auteur inconnu)
L’enfant libre regarde tout avec un regard neuf. Il est toujours en état d’alerte, avide de comprendre le monde extérieur. Il n’a pas d’a priori ni de préjugés. À l’inverse, adulte, nous avons une tonne de préjugés, d’a priori et de connaissances que nous ne pensons pas à remettre en question.
Typiquement, ceux que l’on qualifie d’artistes ont souvent une grande part d’enfant libre en eux ; et ce n’est pas forcément lié à des capacités imaginatives extraordinaires au départ, mais surtout lié à leur capacité à voir le monde avec curiosité, à continuer de s’étonner là où les autres passent leur chemin.
Voilà donc une première piste : observez le monde avec curiosité. Faites comme si vous découvriez ce qui vous entoure. Posez plus de questions, que vous ne donnez de réponses…
L’enfant libre est sensible
Nous avons tendance dans notre culture à associer sensibilité et sensiblerie. Si tel est votre cas, je vous invite à faire preuve d’ouverture et de curiosité (retour au point précédent). Être sensible, c’est « être capable de sensation et de perception » (Larousse). C’est donc accéder et laisser la place aux perceptions que nous avons grâce à nos différents sens.
L’enfant libre voit, entend, sent, ressent avec une puissance incroyable ! L’enfant libre vit dans l’instant présent. C’est ce qui lui permet d’être attentif à tout ce qui se passe autour de lui. Il sait mettre toute son attention sur ce qu’il observe, entend, goûte, touche etc…
C’est un vrai challenge pour nous adultes qui sommes continuellement en train d’anticiper le futur et repenser au passé. Nous vivons très peu dans l’instant présent. Et cela nous coupe d’une très grande partie de nos sens.
Prenons un exemple : vous allez vous balader une petite heure. En mode adulte, votre corps va marcher, mais votre esprit sera totalement ailleurs. Que vous pensiez à votre travail, à vos prochaines vacances, que vous répondiez au téléphone, dans tous les cas, vous n’êtes pas là. En mode enfant libre, vous allez regarder partout autour de vous, vous allez prêter attention à tous les bruits que vous entendez, à toutes les odeurs que vous percevrez. Vous allez observer la nature, vous émerveiller et vous interroger…
La sensibilité de l’enfant libre se place aussi au niveau des émotions. L’enfant ressent fortement. Il pleure quand il est triste. Il se met en colère face à l’injustice. Il rit à pleine gorge lorsqu’il est heureux. Les émotions sont omniprésentes. Se reconnecter à son enfant libre, c’est oser une expression plus spontanée de ses émotions et sentiments. Autant dire que nous avons souvent beaucoup de travail sur ce registre, tellement nous vivons dans une culture où les émotions font peur, où il faut les cacher, les contrôler… C’est une véritable libération qu’il faut opérer dans ce domaine pour laisser notre part d’enfant s’exprimer. Et ça ne veut pas dire qu’on fera des caprices à longueur de temps… car laisser s’exprimer nos émotions, c’est certes laisser davantage s’exprimer la tristesse, la peur ou la colère, mais aussi et surtout la joie. Et nous avons tellement besoin de joie, d’optimisme dans notre monde ! Retrouver son enfant libre, c’est retrouver sa joie de vivre. Et même si j’ai dit plus haut que l’enfant libre pouvait être égoïste, la joie est une émotion qui se partage et c’est une émotion qui est contagieuse. C’est d’ailleurs pour cette raison que les gens dont l’enfant libre est très présent, sont des personnes dont la compagnie est fortement appréciée. Donc n’ayez crainte ! Vous continuerez d’être aimé si vous laissez votre enfant libre exprimer ses émotions.
La deuxième piste que je vous propose est donc d’éveiller vos sens. Obligez-vous, ne serait-ce que quelques minutes par jour, à faire une sorte de check-up de vos sens. Qu’est-ce que j’entends en premier plan, en arrière-plan ? Qu’est-ce que je vois ? Qu’est-ce que je touche ? etc… Prenez le temps, ancrez-vous dans l’ici et maintenant. Et je suis certaine que vous (re)découvrirez des sensations.
L’enfant libre est spontané
Sauter à pieds joints dans une flaque d’eau, se mettre à danser dans un magasin parce qu’on entend notre chanson préférée, dire à ceux qu’on aime qu’on les aime ou à ceux qui nous agacent, qu’ils nous agacent… L’enfant libre est capable de cela. Il ne se pose d’ailleurs même pas la question de savoir s’il peut, ou ce que les autres vont dire ou penser de lui. Il le fait, car, là maintenant, c’est ce qu’il a envie de faire, c’est ce qui lui semble juste, vrai. Alors oui encore une fois, on peut le taxer d’égoïsme ou de manque d’empathie, car il ne prend pas du tout en considération ce que cela génère chez les autres, mais avouons-le, nous avons tous dès fois rêver de savoir nous lâcher comme ça. Mais plus on grandit, plus on se met des interdits sur une tonne de choses. Si certains interdits sont justifiés, d’autres sont complètement absurdes et nous éloigne de qui nous sommes réellement. Finalement, qui a dit que ça ne se faisait pas de se mettre à danser sous la pluie et sauter dans les flaques d’eau ? Votre maman sans doute. Mais aujourd’hui, vous êtes adulte. Vous avez toute la capacité de prendre une décision en sachant que ça peut être drôle ou libérateur pour vous sur l’instant, mais qu’ensuite vous serez mouillés. Mais si vous en avez vraiment envie, alors qui vous en empêche ? sûrement simplement le regard des autres…
L’autre élément qui bride notre spontanéité, c’est notre besoin de tout planifier, tout maîtriser. Dans tout cela, peu d’improvisation et donc peu de place à la spontanéité. Mais comme rien ne se déroule jamais exactement comme prévu, un adulte va être contrarié devant l’aléa qui se présente, alors qu’un enfant libre va savoir tirer parti de cette surprise. Car ce qui guide un enfant libre, c’est l’instinct et l’intuition. Cela le rend très souple, résilient et capable de s’adapter à des situations inattendues.
La 3ème piste que je vous propose est de savoir de temps en temps arrêter de faire ce que vous pensez devoir faire, et opter pour ce que vous avez envie de faire. Pour cela, je vous invite à vous « offrir » une journée pour vous. Dans cette journée, zéro planification et zéro « il faut/je dois ». La seule chose qui compte : vos envies, ce qui vous ferait plaisir. Pour une fois, laissez-vous guider par votre cœur. Car c’est votre enfant libre qui en tire les ficelles.
L’enfant libre est créatif
La créativité est une compétence de plus en plus recherchée. Hélas, on a tendance à croire qu’il y a des personnes créatives et d’autres pas. Mais en réalité, nous avons tous un pouvoir créatif. C’est « juste » que c’est notre enfant libre qui le détient. La question n’est donc pas de savoir si vous êtes créatif ou non, mais si vous vous autorisez à exprimer votre enfant libre ou non. Pour vous en convaincre, donnez une feuille et un feutre à un enfant et demandez-lui de dessiner ou écrire une histoire. Il s’y mettra avec plaisir. Et vous avez été comme ça petit. Il n’y a aucune raison pour que vous ayez perdu cette aptitude.
Ce qui va en général bloquer un adulte, c’est le regard des autres, c’est le poids des conventions, des règles, des codes… Pourtant, je ne vous conseille pas de travailler ce poids du regard des autres frontalement. Le mieux est d’expérimenter votre créativité dans des moments où vous êtes seul, puis dans des moments où vous vous sentez dans un espace sécurisé etc…
Laisser notre enfant libre s’exprimer, c’est nous donner à nous-même l’autorisation de pouvoir être encore cet enfant. C’est d’abord et avant tout le regard que nous portons sur nous-même qui compte. Donc commençons par là. Et je suis certaine que si vous posez un regard moins sévère envers cette part de vous-même, alors vous accorderez moins d’importance à ce que les autres peuvent penser…
Mon conseil si vous avez envie de retrouver votre créativité, commencez par les 3 points précédents. Il n’y a nul doute que vous vous reconnectiez à votre créativité en passant par là ;). Sinon, vous pouvez aussi jouer à l’un des jeux les plus courants chez tous les enfants : jouer à « faire comme si ». Et si vous commenciez par faire comme si vous étiez créatif ?
Vous le voyez, notre enfant libre est d’une richesse incroyable. Et cette richesse, nous la possédons tous. Il serait donc bien dommage de s’en priver.
Je sais cependant que ce n’est pas évident pour tout le monde. Alors, pour finir cet article, voici un exercice proposé par Marie-France et Emmanuel Ballet de Coquereaumont dans leur livre Libérez votre enfant intérieur.
Exercice pour se reconnecter à son enfant libre : retrouvez vos rêves d’enfant
Tel un détective, vous allez partir à la découverte de vous-même. Vous allez retrouver vos rêves et vos aspirations profondes en répondant aux questions suivantes par une courte phrase :
- Mon jouet favori dans l’enfance était …
- Mon jeu favori dans l’enfant était …
- Mon histoire préférée, enfant, était…
- Les films que j’aimais, enfant, étaient …
- Les lectures que j’aimais, enfant, étaient…
- Lorsqu’on me demandait, enfant, le métier que je désirais faire, je répondais …
- Je rêve secrètement de …
- Si je ne croyais pas que c’est trop tard ou que j’en suis incapable, je …
- Je ressens un profond bien-être à chaque fois que je …
- J’ai confiance en moi quand je …
Après chaque réponse, respirez amplement et percevez un nouvel élan qui envahit chacune de vos cellules. Vos goûts d’enfant portaient des rêves que vous pouvez aujourd’hui concrétiser. Rien ne s’oppose à ce que vous vous accomplissiez pleinement.
Nous avons tous un enfant libre qui sommeille en nous. Cet enfant que nous avons été, mais que nous avons oublié, voire enfermé quelque part à double tour en grandissant. Le dé-couvrir, c’est se reconnecter à ce que nous sommes profondément. C’est se sentir soi, bien dans ses baskets, « aligné » comme on dit. Et c’est à nouveau accéder à notre curiosité sans faille, nos émotions, notre capacité d’émerveillement, notre part de créativité…
J’espère que cet article vous aura donné envie de partir à sa (re)découverte et/ou vous encouragera à oser l’exprimer davantage. C’est tout le bonheur que je vous souhaite !
Belle rencontre avec votre enfant libre 😉
Marion