Dans le langage courant, on peut avoir tendance à confondre spontanéité et authenticité, qui globalement s’opposeraient aux faux semblants, à la langue de bois, aux simulacres…Cependant la nuance entre ces deux notions a toute son importante, car cela peut amener à des comportements totalement différents. Selon la définition du Larousse, être spontané, « se dit de quelqu’un qui obéit à ses premières impulsions, qui exprime sans détour ce qu’il pense », alors qu’être authentique signifie « dont l’exactitude, l’origine, l’attribution est incontestable ».

La spontanéité répond donc avant tout à des réflexes, des automatismes, qui semblent hors de notre contrôle. Pour autant, trahissent-ils ce que nous sommes profondément ? Notre spontanéité est-elle le reflet de notre authenticité?

Le schéma ci-dessous illustre les mécanismes à l’œuvre dans notre manière d’agir et de voir le monde. La partie grisée rassemble ce qui se joue souvent de manière inconsciente.

part inconsciente de nos actions

Le 1er apprentissage est donc de réaliser que nous sommes loin d’être totalement conscient de ce qui se passe en nous et que nous ne sommes pas des êtres aussi rationnels que nous aimerions le croire. Ainsi plus de 90% de nos actions se feraient de manière totalement automatiques et donc inconscientes. C’est notre fameuse spontanéité.

A la racine de notre spontanéité se trouve nos croyances. Celles-ci peuvent être justes, mais peuvent aussi être erronées ou limitantes. Pour gagner du temps et de l’énergie, notre cerveau a tendance à faire des raccourcis. C’est ainsi, par exemple, que d’après une seule et mauvaise expérience, on peut en faire une généralité (la croyance est donc que c’est ‘‘toujours ainsi »,  »chaque fois comme ça »,  »jamais comme ci »….). Nos croyances s’expriment aussi par des « il faut », « je dois »; comme si une main invisible tirait les fils de la marionnette que nous sommes. Sauf que comme nous sommes complètement habitués à cela, nous ne voyons plus les fils et pensons que nous agissons en étant totalement libres, conscients et authentiques.

le 2ème apprentissage est donc de prendre conscience de certaines de nos croyances qui vont influencer nos pensées (voir les drivers sois parfait, depeche toi, fais plaisir, sois fort, fais des efforts), et d’essayer de les revisiter pour voir si elles sont toujours justes et aidantes, ou si elles sont devenues limitantes (dans ce cas, elles peuvent nous pousser dans des impasses et/ou des scénarios de vie répétitifs et contre-productifs). Décider en pleine conscience des croyances que l’on conserve et de celles que l’on abandonne, permet de retirer les premiers fils de notre marionnette.

Le 3ème apprentissage est de prendre en considération les émotions qui sont générées par nos pensées. Et là, dans nos cultures prônant le rationnel et reléguant les émotions à des sensibleries à taire et à contrôler, force est de constater que nous ne sommes pas très armés pour les entendre, les comprendre et encore moins les nommer (notre vocabulaire émotionnel étant particulièrement pauvre…). Mais qu’on le veuille ou non, ce sont nos émotions qui dictent nos actions (le dessin animé Vice Versa le démontre parfaitement). Le mot émotion vient d’ailleurs du latin motion qui signifie mouvement. L’illustration ci-dessous montre les 4 émotions de base, leurs origines et les besoins associés. Lorsque nous sommes en mode spontané et donc automatique, c’est en général l’action primitive qui va prévaloir. Nous sommes donc avant tout des êtres émotionnels, et même si on ne veut pas montrer notre peur, notre colère, notre tristesse ou notre joie, l’émotion activée en nous, se reflète dans nos actions.

dessin émotions de base

Prendre conscience de ses émotions, de ce qui les a générées et de ce qu’elles nous poussent à faire, c’est encore une fois, enlever des fils à notre marionnette. Petit à petit, on se libère, et c’est notre authenticité qui prend le pas sur une spontanéité qui ne nous appartenait pas vraiment.

Lorsqu’on préfère garder le voile sur nos croyances et nos émotions, on reste principalement dans des actions primitives, qui permettent de maintenir notre réalité et renforcer nos croyances. Ces croyances peuvent nous amener à voir les choses de manière assez hostile, et donc pour s’en protéger et pour obtenir la reconnaissance et l’amour des autres, on se pare d’un ou de plusieurs masques. On s’éloigne alors encore plus de notre authenticité. Et plus on porte des masques depuis longtemps et de manière fréquente, plus on peut avoir l’impression qu’il s’agit réellement de nous et de notre personnalité. Ce qui, au départ était donc une adaptation et une protection, nous colle de plus en plus à la peau. Nos réactions nous paraissent certes très spontanées, mais elles sont loin d’être le reflet de notre être véritable.

Louise Bourbeau, dans son livre les 5 blessures qui empêchent d’être soi-même, déroulent tous ces mécanismes. La blessure initiale, les croyances qu’elle entraine, le masque que l’on met, les comportements que l’on adopte etc… Tant que l’on se trouve pris au piège de ces mécanismes nous ne sommes pas authentiques et libres.

Tout le travail consiste alors à se libérer de ses croyances et de ses masques pour ne plus être en REACTION, mais en ACTION.
Si l’on reprend l’image qui illustre cet article, il s’agit de prendre conscience des fils qui nous guident et du masque que l’on porte, pour pouvoir s’en détacher et accéder ainsi à notre authenticité.
Il en suivra alors une étape où on aura gagné en authenticité mais perdu en spontanéité. Il faut effectivement un peu de temps à notre cerveau pour construire de nouvelles connexions et trouver de nouveaux chemins pour réagir différemment à un stimulus connu. Une fois que cela est fait, on créé alors de nouveaux réflexes, de nouvelles spontanéités beaucoup plus alignées avec notre authenticité.

Mais attention à ne pas créer de nouveaux fils et de nouveaux masques car c’est le naturel de l’Homme de s’adapter à son environnement pour être accepter et aimable, et c’est aussi la base du fonctionnement de notre cerveau de générer des raccourcis. C’est donc un travail constant de remettre de la lumière sur la partie grisée de nos croyances, pensées et émotions.

« Ce n’est pas en regardant la lumière qu’on devient lumineux, mais en plongeant dans son obscurité » Carl G. Jung

Marion OUDOT

Share This