L’un des sujets sur lequel j’interviens le plus est celui du changement et notamment du changement de carrière. En général, les personnes me sollicitent surtout pour trouver leur voie. Elles sont dans une période où elles ont l’impression d’être dans un brouillard total. Elles ne voient pas du tout ce qu’elles pourraient faire. Tout ce qu’elles savent, c’est qu’elles ne sont plus épanouies dans leur job actuel.

Prendre conscience de son insatisfaction et se donner les moyens de ne plus subir en sollicitant une aide extérieure est déjà une belle première étape. Ensuite, en 3 à 4 séances, nous parvenons à dissiper le brouillard. La personne repart pleine d’énergie. Elle sait ce qu’elle veut faire. Elle avouera même qu’en fait, au fond d’elle-même, elle le savait déjà, mais là maintenant, c’est une évidence qu’elle se sent prête à exposer au grand jour. Elle repart aussi pleine d’énergie car elle a une vision plus complète de ses compétences, de ses talents, de ses moteurs, de ses valeurs…
Oui, mais voilà. Passé le moment de délivrance à avoir enfin plus de visibilité sur soi et sur son prochain objectif professionnel, voilà que l’on prend conscience qu’une énoooooorme montagne se dresse sur notre route. Une montagne tellement haute qu’elle laisse déjà une ombre entachée notre projet.

« Sur le papier, c’est génial ! Mais en réalité, c’est impossible… »

Idéalement, on aimerait passer d’un clin d’œil de notre vie pro d’avant à notre vie pro rêvée. Mais la réalité n’est effectivement pas si simple. D’ailleurs, si elle l’était, ça se saurait ! Il n’y aurait alors pas autant de personnes qui « subissent » leur quotidien.

Cependant, dans notre tendance à voir les choses de manière binaire, c’est comme si, sur une échelle de 0 à 10, nous rêvions qu’il y ait 0 effort. Et comme ça n’est pas le cas, nous nous projetons directement au maximum, c’est à dire à 10.

Et voilà, comment notre machine à excuses se met en route…

« J’aimerais bien, mais financièrement ce n’est pas possible »

La question financière est en effet souvent la première à être levée. Et pour tous ceux qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat, c’est en général une question encore plus forte. Il est en effet rare que l’on gagne tout de suite beaucoup. Et encore plus rare que l’on gagne autant voire plus que ce que l’on gagnait lorsqu’on était salarié. Mais là, je ne parle que d’argent. Car bien sûr, on gagne d’autres choses lorsque l’on mène à bien un projet qui nous tient à coeur. Mais là n’est pas la question. En tous cas, pas à ce stade.
L’objectif n’est bien sûr pas de se mettre financièrement dans le rouge. Cependant, quand je demande aux personnes si elles ont une idée précise de ce que ce serait, pour elles, être dans le rouge, et des efforts financiers envisageables qui ne les mettraient justement pas dans cette situation, j’ai rarement une réponse claire. Donc je leur demande entre 2 séances de faire un point financier précis en tenant compte des dépenses incompressibles (besoins de premières nécessités, prêts à rembourser…), des plaisirs dont on ne veut pas se priver et potentiellement des économies qu’on a pu faire dans le passé et qui pourraient justement servir dans de telles circonstances. A ce stade, 80% des personnes m’avouent que financièrement ce serait possible si elles réduisaient leur train de vie (tout en gardant des plaisirs car j’insiste toujours sur ce point qui est essentiel). Mais elles ne se sentent pas de faire cela car ces restrictions ne les concerneront pas uniquement, mais impacteront toute la famille. Et imaginons en plus, que notre projet ne fonctionne pas…. et hop, 2 nouvelles excuses apparaissent !

Il est souvent plus facile de se dire qu’on n’a pas les moyens, plutôt que d’oser investir ses moyens sur soi…

« J’aimerais bien, mais c’est toute la famille qui va en pâtir »

On a forcément envie de pouvoir faire plaisir à son conjoint et à ses enfants. On veut leur offrir une belle vie. Mais souvent, on a déjà la chance d’avoir beaucoup de choses. Est-ce que vraiment, ce serait faire souffrir toute la famille, que d’acquérir un peu moins de nouvelles choses dans les prochains mois ? Quelle marge de manœuvre avez-vous entre le fait de diminuer un peu et mettre votre famille dans le manque ? Et puis, demandez-leur simplement ce qu’ils attendent de vous. En premier lieu, ils vous diront sans doute qu’ils ont envie que vous soyez là (et vraiment là…), que vous soyez détendu, de bonne humeur, souriant… Bref heureux et épanoui. Vous savez le truc qui vous manque actuellement et qui fait que justement, vous avez entrepris des démarches pour changer de situation professionnelle.

Il est souvent plus facile de se cacher derrière le rôle que nous pensons devoir jouer, plutôt qu’être, tout simplement…

« J’aimerais bien, mais si ça ne marche pas… »

Oui, c’est une possibilité.
Mais si on regardait d’abord toutes les raisons qui font que ça pourrait marcher ?
Ensuite, bien entendu, il ne faut pas être naif. Rien ne nous tombe dans le bec comme ça, sans effort et sans risque. No pain, No gain, comme on dit ! Pour que ça marche, il faut commencer par miser. Et plus la mise de départ est importante, plus la possibilité de gain est forte. Mais contrairement à ce qu’on aimerait croire, la mise la plus importante au départ pour réussir n’est pas une mise d’argent, mais une mise sur soi. Et finalement, c’est ça qui fait peur…

Plus que le risque d’échouer, c’est donc surtout la manière dont on vit l’échec qui fait la différence. Plus vous dissociez ce que vous êtes de ce que vous faites, plus vous êtes capable de passer au delà de l’échec et même d’en faire une source d’apprentissage. C’est notre fameuse capacité de résilience. C’est comme ça que nous évoluons depuis notre plus jeune age. C’est comme ça que nous avons appris à marcher, à parler, à conduire… ok, vous me répondrez peut-être que les conséquences ne sont pas les mêmes. Très bien. Allons au bout de votre scénario du pire. Au pire qu’est-ce que vous risquez ? Et ensuite qu’est-ce qui se passera ? et ensuite ? et ensuite ? …. En réalisant cet exercice jusqu’au bout, vous verrez qu’après le creux de la vague, on finit toujours par remonter. Et qu’encore une fois, le premier ressort n’est pas financier, mais se trouve en chacun de nous.

Il est également intéressant d’entendre toutes les personnes qui ont osé franchir le pas et qui ont connu des échecs. Pratiquement toutes ont le même discours : elles ne regrettent absolument pas leurs choix. Elles ont su rebondir, apprendre de leurs erreurs, et surtout, elles sont fières d’elles. Fières d’avoir oser, d’avoir miser sur elles et leurs rêves. Se donner les moyens d’aller au bout de ses aspirations professionnelles n’a pas de prix…Ou peut-être celui de la réussite…et ça, tout le monde n’est pas à l’aise avec cette idée…

Il est souvent plus facile de s’imaginer échouer que de prendre le risque de miser sur soi

« J’aimerais bien, mais que vont penser les autres… »

L’Homme étant d’abord un animal social, nous avons besoin de voir dans le regard des autres que nous avons de la valeur. Et dans notre société, nous pouvons associer notre valeur à ce que nous possédons et au « prestige » d’un rôle que nous tenons.

Mais il y a un biais considérable là-dedans: c’est que la manière dont nous pensons que les autres nous perçoivent n’est que le reflet de nos peurs et de la façon dont nous nous évaluons nous même.

Donc si dans ma tête, le « prestige » d’une fonction ou mon train de vie reste un critère essentiel pour estimer ma propre valeur, il y a de forte chance pour que je pense que les autres posent le même regard sur moi, et que je vive donc particulièrement mal les différences qui pourraient apparaitre si je suis dans l’obligation de restreindre mon train de vie. Mais si mon critère devient celui de l’épanouissement personnel, ou celui d’être assez fort pour sauter le pas et suivre mes aspirations professionnelles, alors, je ressentirai de la fierté d’avoir oser. Et dans le regard des autres, je verrai alors sans doute la même chose.

Il est souvent plus facile de se préoccuper de son image envers les autres, plutôt que travailler son image envers soi-même…

« J’aimerais bien, mais je n’ai vraiment pas le temps … »

Vous n’avez pas le temps ou vous ne prenez pas le temps ? A quoi est-ce que vous utilisez votre temps alors ?
Nous avons tous un rapport au temps qui nous appartient, mais je suis sûre que si vous calez dans vos agendas, ne serait-ce qu’une heure par semaine de RDV avec vous-même pour avancer sur votre projet, vous le trouverez et vous me direz spontanément, que vous pouvez même caler 2H. Oui mais voilà, une « urgence » ou un contretemps, et hop, le RDV saute.
Alors dîtes moi vraiment, qu’est-ce qui est plus important que votre épanouissement ? Qu’est-ce qui vous a empêché de dire non ou de dire oui et de repositionner immédiatement le RDV à une autre date ? Est-ce vraiment un problème de temps ? En général, la réponse est non. C’est «juste» qu’on culpabilise à l’idée de se consacrer 1H par semaine ou que cette rencontre avec soi-même nous fait terriblement peur car elle nous met en face de choses que nous n’avons pas envie de voir.

Il est souvent plus facile de dire qu’on manque de temps que de se confronter à soi-même…

« J’aimerais bien, mais ce n’est pas le bon moment… »

A 20ans, on n’a pas assez d’économie et d’expérience ;
A 30ans, les enfants sont trop petits ;
A 40ans, il y a encore la maison à rembourser et les études des enfants à payer ;
A 50ans, notre confort de vie est tellement agréable qu’on se demande si ça en vaut la peine ;
A 60ans, à quelques années de la retraite, c’est trop tard…

Est-ce que le bon moment existe vraiment ? La réponse est sans doute non… D’ailleurs, la majorité des personnes se lancent dans une reconversion lorsqu’elles viennent de subir un revers professionnel. On est loin de la situation idéale… D’autant plus qu’au delà d’une situation économique plus précaire, c’est une période qui secoue personnellement et qui n’est donc pas propice à la confiance en soi…

Il est souvent plus facile de prétexter une situation non idéale, que de faire avec les contraintes inhérentes à chaque période de notre vie…

« J’aimerais bien, mais je n’ai pas les compétences… »

Quelles compétences précises vous manquent-ils ? Sont-elles réellement indispensables ?
Souvent, je vais avoir des réponses très vagues. Les personnes ne se sont pas vraiment posées la question des compétences, mais puisque, plus jeunes, nous nous sommes formés de façon académique à notre futur métier, nous partons du principe qu’il est sans doute nécessaire de repasser par cette étape. Et oui, ça peut effectivement être nécessaire. Je suis moi-même passée par là. 
Mais cependant, demandez-vous quand même si les compétences qui semblent vous manquer sont réellement indispensables ou vous permettraient « simplement » de vous rassurer ?

En fait, très souvent, on fait face à une question de légitimité : qui suis-je, moi, pour me lancer et réussir là dedans alors que je n’y connais rien ?
Êtes-vous sûr de ne vraiment rien y connaitre ?  J’imagine quand même que vous devez connaitre plus de choses que ce que vous dites si vous êtes prêt à en faire votre métier…. Ne serait ce pas plutôt le syndrome de l’imposteur qui pointe son nez ? 

Alors, c’est vrai que si vous recherchez un poste salarié, les entreprises vont sélectionner les candidats notamment sur leurs compétences et savoir-faire. Mais toutes, ne sont pas en recherche d’experts. Et les soft skills pèsent de plus en plus lourds dans les choix des recruteurs.

Et pour ceux qui veulent se lancer dans un projet entrepreneurial, idem, il n’est pas nécessaire d’être un expert. Tout dépend de votre cible. Est-ce que vous voulez vous adresser à des débutants, à des passionnés, à des experts ou à des intermédiaires ? En fonction, il faudra « juste » en savoir un peu plus que votre cible.

Et puis, si vraiment vous avez besoin d’une expertise particulière, alors Go, formez-vous ! Nous avons la chance d’avoir accès à de nombreux dispositifs de formation. Il serait dommage de s’en priver.

Il est souvent plus facile de jouer les modestes que de se dire capable et de devoir ensuite le démontrer…

« J’aimerais bien, mais j’ai pas le choix… »

Ultime argument qui tombe comme une sentence et plonge chacun dans un fatalisme étourdissant : l’absence de choix.
Alors, non non non. Nous avons toujours le choix. Et ne pas faire de choix est un choix. Celui du statu quo. C’est souvent notre choix préféré. On y est tellement habitué qu’on le fait inconsciemment. Et comme on a l’impression de ne pas faire de choix, on subit. Notre frustration augmente. Et elle écorne au fur et à mesure notre estime de nous et nos relations aux autres. C’est comme ça que l’on rentre petit à petit dans la peau d’une victime. Et dès fois, c’est sympa. Parce que ça nous permet de nous plaindre, de susciter de l’attention : « moi, j’avais pourtant une idée de dingue. Je suis sûre que mon projet aurait cartonner… Oui, mais voilà, j’avais pas le choix » … Comme l’explique parfaitement cette vidéo de «Et tout le monde s’en fout», il y a un verbe magique qu’on oublie trop souvent, c’est le verbe POUVOIR.

Il est souvent plus facile d’être victime que d’être acteur et devenir responsable de sa situation…

Lorsque vous hésitez à prendre une décision, on vous a sans doute déjà conseillé de faire un tableau avec des + et des -. L’avez-vous déjà fait, avec d’un côté « rester dans mon job actuel » et de l’autre « faire le job dont j’ai envie » ?

Ecrire clairement les avantages et les inconvénients peut vous aider. Mais ce qui vous fera surtout passer à l’action, c’est votre perception des efforts à fournir. Et toutes les excuses que nous venons de voir ont cet objectif : gonfler notre perception des efforts nécessaires.

Notre motivation à changer, notre capacité à passer à l’action, dépend en effet de cette équation :

avantages de la situation actuelle < (avantages de la situation future) x (efforts à fournir)

Les efforts ne seront jamais nuls, mais ils sont sans doute très différents de ceux que vous pouvez imaginer et derrière lesquels vous pouvez vous cacher.

Pour être passée par là, je sais à quel point ce n’est pas évident. Je connais parfaitement toutes ces excuses pour les avoir même pratiquées. Mais je sais aussi qu’elles sont avant tout là pour nous éviter de se confronter aux « vrais » problèmes, qui vont souvent tourner autour des questions de confiance en soi, d’affirmation de soi, de renoncements nécessaires etc… L’effort le plus difficile sur ces sujets est d’admettre qu’on a un besoin là-dessus et demandez l’aide à un professionnel. C’est ensuite un travail de tous les jours, mais étrangement, le plus gros effort est déjà passé… 

Pour aller plus loin, je vous invite à lire l’article sur le voyage du Héros qui est une métaphore qui illustre parfaitement les étapes par lesquelles on passe lorsqu’on vit un changement profond.

J’espère que la lecture de cet article vous aura permis de prendre conscience de vos véritables freins. Encore une fois, rassurez-vous, tout le monde passe par là. Mais tant que vous regardiez ailleurs, vous ne pouviez pas vous atteler à dénouer les vrais noeuds. Des peurs seront toujours présentes et tant mieux ! Elles sont un indicateur précieux de ce qui est important pour vous et de ce qui peut présenter des risques. Important pour vous, mais avec des risques, ça résume bien vos envies, non ?

Alors regardez ces peurs en face et vous pourrez ainsi progressivement passer d’un « j’aimerais bien, mais j’peux pas » à un « j’y vais, mais j’ai peur » 😉

Je vous souhaite sincèrement d’oser faire ce qui vous tient à coeur.

Marion

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